top of page

Croatie : Quand on essaye de marcher coûte que coûte


Nous nous réveillons dans un abri de garage qui appartient à la paroisse et donc le prêtre catholique qui nous a accueilli la veille doit se servir de temps en temps pour certaines réunions. Profitant d’avoir un vrai toit pour la nuit, on prends notre temps ce matin pour partir. Nous partons donc aux alentours des 10h après avoir remercier le prêtre qui nous souhaite une bonne route avec un « God bless you ». Une centaine de mètres après seulement, on s’arrête à l’école du village, déserte au vu des vacances mais bizarrement ouverte. On se dit qu’on y trouvera bien des toilettes. A l’entrée, il y a Goran, un des professeurs de l’école. Il est jeune, la trentaine, un rire et une énergie communicative. Il nous emmène dans la salle de classe où on trace notre parcours sur les grands atlas affichés au mur comme à la vieille école qu’il nous dit. Lui aussi passionné de randonnée, il nous montre les sommets qu’il a déjà gravi. Je crois qu’il rigole à peu près à toutes les phrases. Surtout il se marre bien de notre aventure! On passe quasi une heure à parler avec lui jusqu’à se décider finalement à « reprendre » la route, du moins à commencer notre journée. Ces jours-ci, c’est bien simple. On marche le long d’une longue route qui traverse la région. Il est déjà 11h passés, 0 km au conteur, mais on ne perd pas tout espoir de faire quelques kilomètres aujourd’hui. Ca c’était sans compter sur ce petit groupe d’hommes assis à l’entrée d’un petit supermarché au village d’après qui nous accoste pour boire une bière. On se marre, on hésite un peu en se demandant du regard si oui ou non on devrait pas mieux continuer puis on vient finalement à leur rencontre. On ne parle pas la même langue mais on arrive à se faire comprendre un peu. Je pense que de là où ils étaient, ils devaient bien se demander qui pouvait marcher ici dans cette région, en plein soleil, sur cette longue route! On discute un moment puis cette fois on reprend la route, déterminés. Mais voilà que deux heures après, une voiture s’arrête devant nous : c’est Goran! Avec Konrad, on rigole de nouveau se disant qu’on voudrait bien marcher mais que c’est pas de notre faute, c’est le destin qui nous envoie des signes. Et il ne faut jamais contrarier le destin. Goran se marre encore plus en voyant qu’on n’a quasi pas avancé depuis tout à l’heure. On est super content de se revoir et il nous invite à boire le café dans un bar. Dans le café, on peut un peu plus parlé. Il nous dit être né en Serbie, il est donc Croate de Serbie et est venu en Croatie avec sa famille après la guerre en échangeant de maison avec une famille serbe de Croatie. Il nous dit qu’ils ont eu la chance de pouvoir faire un échange de maison parce que tant d’autres ne sont venus qu’avec leur valise. Il nous raconte aussi qu’ici se trouve la frontiere avec La Slavonie, une région de l’est de la Croatie qui a beaucoup été touchée par la guerre et maintenant par le chômage et l’exode. Lui travaille dans la région mais habite à une soixantaine de kilomètres au nord. Il se demande bien dans quel domaine les gens ici peuvent trouver du travail. On se quitte après un moment mais il faut savoir qu’on reverra Goran deux jours après sur cette même route alors qu’il revenait de son week-end en famille! Et toujours le même rire, en voyant qu’on n’avait pas bien plus bougé!

Au soir de cette drôle de journée où on aura passé quasi plus de temps à bavarder qu’à marcher, on frappe au portillon de Marianne et Albert. Marianne nous accueille et se met à parler instinctivement en allemand. On lui demande s’il serait possible qu’on puisse planter la tente dans leur jardin pour la nuit et elle nous dit d’entrer avec un sourire nous disant qu’elle doit quand même demander l’accord à son mari. Il est assis à la table du jardin et nous dit de nous assoir avant même qu’on ait pu se saluer. Tout d’un coup, j’ai l’impression que c’était comme s’ils nous attendaient. Car 5 min après, on a devant nous une assiette d’œufs au plat avec du lard grillé. Comment est ce qu’on peut accueillir de manière si naturelle des étrangers à sa table et pour la nuit? Même après plusieurs mois de voyage je n’ai pas vraiment de réponse. Sans doute la capacité de certaines personnes à réserver coûte que coûte de l’énergie et du temps à l’imprévu, à savoir coûte que coûte ce qui doit être fait sans avoir à réfléchir plus longtemps. Peut-être à voir l’imprévu comme un cadeau et non comme une contrainte. Ça questionne aussi beaucoup sur ma propre capacité à agir de même... Marianne et Albert parlent tous deux allemands car ils sont partis vivre en Allemagne avant la guerre et sont revenus après. Ils ont 7 enfants dont la plupart sont là autour de nous. L’un d’eux nous parle aussi en allemand parce qu’il est lui aussi parti vivre en Allemagne pour travailler pendant trois ans. Le premier mois, il n’avait quasi pas d’argent et a dû se débrouiller via des connaissances pour trouver un toit. Parfois, il devait dormir dans sa voiture... Ce fut apparemment trois années assez dures, de solitude. Il nous dit que parce que tant de croates sont partis travailler à l’étranger, il y a maintenant de nouveau un peu de travail ici et c’est pour ça qu’il est revenu en Croatie. On finira cette soirée assez tard sur leur terrasse avant d’aller passer la nuit dans leur caravane qu’ils nous prêtent pour l’occasion.


16 Ansichten0 Kommentare

Aktuelle Beiträge

Alle ansehen

6 mois de marche et donc?

Que dire de ces déjà 6 mois de marche? Un premier rêve s’est déjà accompli, celui d’arriver à Istanbul alors un premier bilan se fait attendre. Je ne parlerai ici qu’en mon nom car l’évolution en chem

Turquie, alors c’était bien vrai !

J’avoue que pour moi la Turquie était le pays le plus désiré sur le chemin parce l’entrée dans ce pays marquait vraiment notre entrée en Orient et marquait la fin de l’Europe. J’me rappelle être entré

Bulgarie, tant pis!

La bulgarie nous restera quasi inconnue tant on a peu rencontré de gens. Dès le premier soir, on s’est vu refuser à tous les coups ou réorienter vers des lieux qui n’existaient pas ou qu’on ne trouvai

bottom of page