Durant tout notre temps en Croatie que nous avons traversé de Zagreb jusqu’à la Serbie en direction de Belgrade, c’est à dire tout l’est de la Croatie, nous avons rencontré énormément de personnes germanophones. On passait parfois plusieurs jours d’affilé à parler allemand les soirs (enfin Konrad, pas moi bien-sûr). Cette région a été apparemment très touché par la guerre de Yougoslavie et dans bien des villages, nous avons pu voir encore quelques séquelles de la guerre telles que des églises détruites, des impacts d’obus sur les murs des habitations. Beaucoup de maisons sont dans certains villages à l’abandon mais pas forcément à cause de la guerre qui a eu lieu une bonne vingtaine d’année auparavant mais surtout à cause d’une situation économique préoccupante. Alors beaucoup de personnes partent émigrer en Allemagne, en Autriche ou en suisse pour trouver du travail. D’où le fait qu’on ait rencontré tant de germanophones. Grâce à leur maîtrise de la langue, on a vraiment pu échanger avec eux. C’est pas comme parler anglais quand c’est une langue qu’on utilise qu’à l’occasion.Là, Konrad pouvait vraiment échanger avec des gens qui parlait couramment sa langue et ça change beaucoup de choses. Ainsi, on a pu comprendre un peu mieux la réalité de la région. Beaucoup nous ont relaté la même chose : des villages qui se vident. Le témoignage qui m’a le plus marqué venait d’un couple de jeunes qui vivait maintenant en Allemagne et qui était là pour les vacances dans leur village natal.
Un jour, on se reposait sur un banc devant une maison quand une jeune fille est apparue par derrière avec un grand sourire pour savoir d’où l’on venait et si on voulait boire quelque chose. Elle a 19 ans, vit en Allemagne depuis ses 16 ans avec son copain et ses parents et étudie les soins infirmiers. Elle est complètement bilingue! Finalement, on passe la soirée avec eux chez son oncle. Elle nous explique que sa mère avait 4 boulots à la fois avant de partir en Allemagne et ne gagnait que 400€ par mois. Son copain, quand à lui, travaillait à plein temps à l’usine pour 350€/mois. Maintenant qu’il travaille en Allemagne, il a pu s’acheter la voiture qu’il voulait. En Croatie, il dit que jamais de sa vie, il aurait pu rêver avoir cette voiture. Mais c’est surtout ce que sa copine me dit qui me touche. Elle me dit qu’en fait, ce n’est pas vraiment pour l’argent si les gens partent. Elle me dit : « je ne veux pas que mon travail ne soit pas respecté ». « En travaillant ici, je toucherais 800€ en tant qu’infirmière et mon copain 350€ » « Je veux pouvoir offrir des vacances à mes enfants. Si on travaille en Allemagne, on peut aller en Espagne ou je ne sais où. Ici, en 16 ans, je ne suis allée que 3 fois en vacances. C’était dans mon propre pays, à 400km mais ça coûtait déjà tellement cher à mes parents ». Pour cette raison, elle veut faire sa vie en Allemagne et revenir ici au moment de sa retraite. Même si elle adore la Croatie, elle ne peut pas s’imaginer vivre dans ses conditions. Elle me dit aussi qu’ici certaines personnes n’ont même pas assez d’argent pour se nourrir correctement. Chaque habitation à son jardin pour subvenir aux besoins mais vivre avec 400€ quand les prix en supermarché sont quasi identiques à ceux de l’Allemagne... Ils me racontent qu’avant dans ce village vivaient 15 000 personnes. Aujourd’hui? 6000. Apparemment en hiver, il n’y a quasiment personne. Seulement l’été, les travailleurs de l’étranger reviennent pour les vacances. Ainsi, en Croatie, j’ai pris conscience à quel point l’Allemagne mais l’Europe de l’Ouest en général est un vivier pour beaucoup de monde. Et que finalement, on cherche bien tous la même chose : mieux vivre et avoir de quoi à offrir à ses enfants.
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